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- PORTRAIT - 

 Camille MATHIEU
"1915 - 2017" 

            Issu d’une famille d’agriculteurs, Monsieur Camille MATHIEU est né le 27 janvier 1915 à Lignières, petit village dans l’Aube. Il était le plus jeune d’une fratrie de trois garçons.

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            Son père, ancien combattant de la guerre 14-18, décédera en 1937 victime des suites d’une maladie découlant des gaz de combat utilisés dans les tranchées.

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            Veuve à l’âge de 49 ans, sa mère a poursuivi seule la gestion de la petite ferme familiale jusqu’au début des années 1970.

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            Après l’obtention de son certificat d’étude primaire, Camille travaillera à l’exploitation jusqu’au 15 octobre 1936, date à laquelle il fut incorporé sous les drapeaux au 18ème Régiment du Génie de Nancy. Le 15 octobre 1938, il souscrit un engagement au sein de ce même Régiment.

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            Le 5 janvier 1939, il change d’orientation en intégrant l’école de la Garde Républicaine Mobile au Fort de Montrouge et rejoindra la 1ère Légion de Garde Républicaine.

           A la signature de l’armistice du 22 juin 1940, Camille rejoindra les forces de gendarmerie Paris-Est à la caserne de Drancy et sera affecté, à partir du 20 août 1941, à la garde extérieure du camp d’internement.

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           De suite, le Gendarme Camille MATHIEU s’est interrogé sur le devenir de personnes qui étaient internés au regard de la loi du 3 octobre 1940 « portant statut des Juifs » : « les ressortissants de race juive… pourront être internés dans des camps spéciaux ». Le climat devenait très malsain.

Le camp d'internement de Drancy

          Positionné sur un mirador, Camille apercevait régulièrement deux femmes qui s’approchaient des limites du camp. A plusieurs reprises il leur demandait de s’éloigner, mais il percevait également leur inquiétude.Elles souhaitaient voir leurs maris.

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           Faisant preuve d’empathie, Camille MATHIEU a répondu à la détresse de ces deux personnes leur proposant de déposer discrètement au pied du mirador leurs adresses en leur promettant de venir les voir prochainement, ce qu’il fit une dizaine de jours plus tard accompagné de son épouse Denise.

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           Quelques jours plus tard, il suggéra aux maris de Mesdames FUCHS et HERTZBERG l’idée de mettre en place leur évasion par les égouts, mais cette solution trop risquée ne fut pas retenue. Il décida avec la complicité de son épouse Denise, infirmière de profession, de leur procurer des médicaments afin de provoquer des troubles cardiaques. Etant tombés malades, ils furent libérés pour raison médicale le 11 novembre 1941 avec l’aide de la Croix Rouge. M. AJDENBAUM a pu bénéficier également de cette situation. C’est ainsi que ces trois personnes échappèrent à la déportation.

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             Camille proposa aux familles FUCHS et HERTZBERG de les cacher en province. Avec la complicité de sa mère Blanche, elles furent hébergées au domicile de cette dernière, à Lignières, jusqu’à la libération.

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            Son épouse Denise sera également très active pour protéger ces familles, en particulier lorsque les soldats allemands ont envahi le village à la recherche de résistants qui avaient commis des sabotages.Denise procura de fausses cartes d’identité et accompagna à Grenoble une des filles de la famille HERTZBERG.

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             Pendant cette période, le Gendarme MATHIEU constatait une nette dégradation des conditions de vie des internés et essayait comme il le pouvait d’apporter son aide en toute discrétion.

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             Le Gendarme Camille MATHIEU continua de transmettre des courriers et de procurer de la nourriture aux autres internés. Surpris par sa hiérarchie, il fut sanctionné de plusieurs jours d’arrêt et révoqué de la gendarmerie au mois de mars 1943.

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            De retour à Lignières, dans son village natal, l’un de ses camarades lui proposa de reprendre la gestion d’une librairie à Courtenay fin 1943, ce qu’il accepta. Il fut rapidement approché par un médecin et un vétérinaire pour lui proposer de rejoindre la Résistance. Connaissant la bonne réputation de ces deux personnes, il rejoignit au début de l’année 1944 les FFCI (Forces Françaises des Combattants Indépendants) au sein du 1er Régiment des Volontaires de l’Yonne.

            Il intégra le Groupe Jean-Marie BUCKMASTER avec pour mission de réceptionner des parachutages d’armes et participera à des destructions de voies ferrées.

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            Le 01 octobre 1944, il est nommé adjudant FFI, puis participe avec le 35ème Régiment d’Infanterie aux durs combats de la Campagne d’Alsace. Sur les 100 camarades de combat qui étaient originaires de Courtenay, 30 ne reviendront pas.

Après la fin de guerre, l’Adjudant MATHIEU sera envoyé en Allemagne, de 1945 à 1952, affecté successivement au35ème Régiment d’Infanterie et au 12ème Bataillon de Commandement, puis sera envoyé en Algérie au 9ème Zouaves comme Adjudant-chef jusqu’en 1956.

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            Il rejoindra l’école du Génie à Versailles puis la direction du Génie à Paris d’où il prendra sa retraite militaire le 1er septembre 1962.

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            Il poursuivra sa carrière professionnelle comme conducteur de travaux au génie militaire à titre civil jusqu’au mois de décembre 1964, puis en qualité de métreur dans une entreprise civile jusqu’au 30 juin 1976.

  " Une reconnaissance méritée "   

           Après la guerre, les familles sauvées du camp de Drancy ont toujours eu une profonde reconnaissance pour Monsieur et Madame MATHIEU et sont devenus avec le temps de vrais amis.

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            A l’insu de Camille et de Denise, les familles HERZBERG et FUCHS ont effectué les démarches nécessaires pour obtenir leur nomination et celle de Blanche MATHIEU comme « Justes parmi les Nations ».

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            Ils seront tous les trois reconnus en 1975 et honorés à Paris en 1976 se voyant décernés ce titre par l’ambassadeur d’Israël en France qui leur a remis un diplôme et une médaille portant cette phrase du Talmud « Qui sauve une vie sauve l’univers tout entier ».

 « Ce monsieur au grand coeur, qui ne nous était rien, s’est dévoué pour nous ainsi que sa femme, comme les meilleurs amis du monde et les plus sincères qu’ils sont restés, avec un désintéressement total et au mépris du danger, jusqu’à courir les plus grands risques pour eux et les leurs ».

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(Propos que Mme HERZBERG lors de la cérémonie de la remise des 3 titres de Juste)

          En juin 1978, Camille et Denise ont été invités pendant une dizaine de jours en Israël et ont été honorés lors d’une cérémonie officielle pour planter un Caroubier (l’arbre de la Paix) dans l’allée des Justes à Jérusalem et participer au ravivage de la flamme du souvenir du Mémorial.

           Les noms de Camille, Denise et Blanche MATHIEU sont inscrits sur le mur des Justes, allée Geoffroy Lasnier à Paris 4ème, à coté du Mémorial de la Shoah.

          Adhérent de l’Association des Anciens Combattants de la Police Nationale, Monsieur Camille MATHIEU a participé régulièrement à nos actions en apportant son témoignage, notamment lors de l’inauguration départementale de l’exposition « Désobéir pour Sauver, des Policiers et des Gendarmes Français Justes parmi les Nations »,qui s’est déroulée le samedi 24 avril 2010, sur la commune des Lilas Seine Saint-Denis, à l’occasion de la « journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la Déportation », avec M. le Préfet délégué de la Seine-Saint-Denis en présence des autorités militaires et de nombreuses invités.

Camille MATHIEU conversant avec le public
Camille MATHIEU
"Juste parmi les Nations"

          « Au moment où la barbarie la plus absolue régnait dans les camps, ces Justes ont non seulement sauvé des vies humaines, mais ils ont aussi incarné l’honneur de l’humanité qui, grâce à eux n’a pas totalement sombré à Auschwitz. En ayant eu le courage de suivre leur conscience plutôt que les ordres de leur hiérarchie, ils nous rappellent que l’histoire est constituée d’une longue chaîne de responsabilités, individuelles et collectives, et que chacun de nous en est un maillon précieux qui fait que l’histoire chavire ou au contraire avance.

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          Les Justes policiers et gendarmes l’ont fait avancer, ils ont été en cela des lumières dans la nuit de la Shoah »…..

 

(Extrait de l’éditorial de Madame Simone VEIL, marraine de l’exposition)

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          Cette exposition rend également hommage aux nombreux anonymes qui ne seront jamais reconnus.

 

   

Monsieur Camille MATHIEU était titulaire des décorations et récompenses suivantes :

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               - Chevalier de la Légion d’Honneur, J.O. du 14 juillet 2010 (ainsi que son épouse)

               - Médaille Militaire

               - Médaille de la Résistance

               - Croix de Guerre 39-45 avec étoile de Bronze

               - Titulaire d’une citation à l’Ordre de la Brigade

               - Droit au port de l’insigne Rhin et Danube 1ère Armée

               - Médaille des Justes parmi les Nations

        Le 10 octobre 2015, Monsieur Camille MATHIEU se voyait décerné la médaille du mérite de l’ A.A.C.P.N. échelon d’Or.

Monsieur Camille MATHIEU s’est éteint dans sa 103ème année, le 24 juin 2017.

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Un Grand Monsieur au parcours exemplaire.

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« RESPECT »

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                                                                                                                                                                                                                                                                                                                          Le Président Alain MANGOU

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